Paris Secret | L'histoire controversée de la Pyramide du Louvre…

Depuis l’Antiquité, la pyramide est entourée d’une aura surnaturelle. À la fois temple et tombeau, elle est le lieu de passage entre deux mondes, entre visible et invisible, réel et spirituel… L'ancien président français François Mitterrand y était sensible. Trois mois après son élection à la présidence de la République en 1981, celui qu'on surnommait « Le sphinx » annonce sa politique de grands travaux, série de projets culturels voués à symboliser le modernisme de la France…

 

Parmi ces projets culturels, le Grand Louvre doit alors incarner la capacité de la France à relever les défis de son temps. Le ministère des Finances, qui occupe toute une aile du palais du Louvre, va devoir déménager pour étendre la surface du musée… Deux ans plus tard, sans appel d’offres et sans concours d’architecture, François Mitterrand choisit son créateur : Leoh Ming Pei, un architecte américain d'origine chinoise. Le Président vient de s’offrir sa pyramide. En 1984, l’architecte présente son projet : une pyramide de verre et de métal située au milieu de la cour Napoléon du Louvre. Elle abritera l’entrée principale du musée et conduira les visiteurs à un vaste espace souterrain, moderne forum où se côtoieront billetterie, boutiques et restaurants, enseignement de l’art et événements de la vie parisienne.

 

Une prouesse technologique

Haute de 21,64 mètres, sa base est un carré de 35,4 mètres. Elle est constituée d’une structure d’acier de 95 tonnes et d’un châssis en aluminium de 105 tonnes. 603 losanges et 70 triangles de verre forment ses parois. Ce vitrage nécessite la mise au point d’un matériau totalement transparent et non réfléchissant. Ainsi, les pierres du palais environnant gardent leur couleur miel. La pyramide capte la lumière du passé et s’en nourrit.

La forme choisie s’inscrit dans une tradition aux multiples références. Comment ? Tout d’abord, PEI conçoit l’agencement des losanges et triangles comme un hommage à la géométrie des jardins à la française conçus par Le Nôtre pour les Tuileries toute proches. Il n’oublie pas qu’au XIXe siècle la construction d’une pyramide, au centre de la cour, avait déjà été évoquée afin d’ériger un monument de reconnaissance à l’empereur Napoléon. Mais c’est avant tout à l’Égypte que la structure nous renvoie. En effet, l’architecte reprend, en les réduisant, les proportions idéales issues du nombre d’or de la pyramide de Khéops. Celle-ci était un tombeau, mais aussi un observatoire, un symbole ascensionnel vers une autre monde.

 

Art et pouvoir

Le projet de Pei fit scandale et déclencha une terrible controverse digne des plus grandes batailles d’opinion, anciens contre modernes. Les opposants crièrent au massacre des valeurs françaises, à la profanation de la mémoire collective. La Pyramide allait défigurer le Louvre tout entier, rompre sa parfaite harmonie et celle de Paris. La fameuse perspective allant du Louvre à l’Arche de la Défense, en passant par l’obélisque de la Concorde et l’Arc de triomphe, serait brisée. La Pyramide fut même qualifiée de « degré zéro de l’architecture », et l’ensemble du projet de « Luna Park de la culture ».

De leur côté, ses partisans défendirent l'idée d'une juxtaposition des styles architecturaux et rappelèrent que le Louvre s’était transformé au cours de son histoire, chaque siècle le marquant de son empreinte. Pour eux, le XXe devait donc laisser sa trace. Très vite, l’affaire devint politique et tourna à l’affrontement gauche-droite. On reprocha à Mitterand d’avoir décidé à la manière des grands monarques, voire des pharaons. On le surnomma même « Mitté-Ramsès ». On vit aussi dans la forme pyramidale une référence à la franc-maçonnerie et à l’appartenance du Président à celle-ci, et on alla jusqu’à tenter d’organiser un référendum populaire ! En 1986, la bataille s’acheva avec une maquette grandeur réelle réalisée sur le site lui-même, rendant la qualité et l’intérêt du projet évidents. En 1988, la Pyramide fut inaugurée.

Aujourd’hui les esprits sont apaisés. La Pyramide a trouvé sa place au Louvre et dans le cœur de ses visiteurs. C’est en effet, l’œuvre la plus appréciée après La Joconde et la Vénus de Milo. Elle est devenue un monument à part entière. Loin de nuire au Louvre, elle l’enrichit. Depuis sa construction, les visiteurs sont passés de trois millions à près de dix millions…Grâce à elle, le Grand Louvre a réussi sa mue.

 

Quand la Pyramide entre dans la légende…

Le monde de la raison s’arrête là et commence celui de l’irrationnel. Dan Brown avec son roman célèbre « Da Vinci Code » donne à la pyramide du Louvre cette dimension ésotérique. Le roman commence sous la structure de verre et d’acier et, sous sa plume, les 673 panneaux de verre deviennent 666, chiffre de Satan. Il se termine sous la pyramide inversée où sont censés se trouver la tombe de Marie-Madeleine et la clé de l’énigme.

Tout cela n’est probablement que fantasme. Mais la pyramide du Louvre est devenue l’un des symboles de la capitale, où la perfection de sa forme se multiplie. Et elle ne sera bientôt plus seule à Paris ! Une pyramide de près de 200 mètres de hauteur s’élèvera bientôt à la porte de Versailles !

 

Matthieu Rochette

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